ÉTALON
vidéo • 2016
4 min 53 / avec Duncan Evennou, Madeleine Fournier, Aude Lachaise, Lynda Rahal / remerciement Clara Stengel / Laboratoires d’Aubervilliers
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Faire l’expérience pourrait être traduit par tenter. Tenter ouvre une potentialité - rendre perceptible ce qui n’est pas encore là ou ce qui aurait put se produire. Dans cette perspective, l’espace de la représentation apparait comme un espace de jeu. C’est à partir de celui-ci donc que les corps et matériaux vont traverser le champ. La traversée de l’espace est un prétexte visant un objectif absurde ou paradoxal, rendu plus complexe que ce qu’il ne parait d’emblée. Elle implique l’entrée, le déplacement et la sortie d’un performeur, ou du moins, son passage d’un point A à un point B. Le cadre devient espace de transition et sa traversée apparait comme fragment d’une histoire. Le hors-champ est le lieu des projections mentales : les scènes, situations ou images, renvoient à différentes lectures de celui-ci. Les corps et les objets traversants proposent un contexte, une fiction le temps de leurs passages. D’où viennent-ils? Où vont-ils? Qu’elle est leur nécessité ? Vers quoi nous redirigent- ils ? Ce premier geste, son potentiel, est la base de l’écriture chorégraphique. Les corps et matériaux sont mis en relation ou en opposition, à travers un protocole de répétition. Élément fondateur du registre burlesque, la répétition, scande le temps de l’action, mais contribue aussi à sa désintégration.
Dans le projet Étalon, l’action est ré-expérimentée autant de fois que nécessaire. La répétition ou la série est pratiquée pour saisir de l’instantanéité, de l’imprévisible. La traversée, prise comme enjeu et motif chorégraphique, est perçue en tant que tentative, pouvant donc échouer. L’échec, le raté, intrinsèque au processus et à l’expérimentation, devient la base de l'écriture. L’action de traverser peut elle aussi être re-définie : se mettre en travers de, faire obstacle à la réalisation d’un projet.
extrait © Pauline Brun